Bijour tout le monde, pour me faire pardonner de ma longue absence, voici-voilà...la suite de "Lorsque l'oiseau vole" !
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Elle n'aimait rien tant que cela. S'asseoir sur un rocher et contempler la mer. Laisser les rayons satinés du soleil caresser son visage. Regarder les bateaux osciller doucement. Écouter le chuchotement des vagues s'écrasant sur les galets, le cri rauque du goéland affamé, ou encore l'harmonieuse symphonie du rouge-gorge perché dans un arbre. Sentir l'odeur âcre des algues qui sèchent. Odeur que certaines personnes détestent odeur qui chatouillait ses narines depuis sa plus tendre enfance. Murmurer ses secrets aux crabes, crevettes ou gobies. Faire couler du sable entre ses doigts, ce sable si fin et doux. Courir dans le vent, pieds nus sur ce même sable. C'était ça la vraie vie pour elle, se sentir en communion avec la nature.
Mais aujourd'hui, quelque chose clochait. La mer était mauvaise, elle pouvait distinguer des moutons blancs d'écume au loin. De lourds nuages noirs masquaient le soleil. Les vagues n'émettaient plus un chuchotement mais un fracas infernal. La marée était haute, si bien que la sable était entièrement recouvert. Le chemin qu'elle empruntait d'habitude pour atteindre son rocher favori lui semblait à présent dangereusement escarpé. Les oiseaux s'étaient tus. Il n'y avait plus aucune trace d'animaux dans les mares d'eau salée.
Tout était différent. Léna avait un mauvais pressentiment. Elle se hissa malgré tout sur son bloc de granit préféré. De là-haut, elle avait vue sur toute la plage. Elle inspira, mais ce ne fut pas la fragrance familière des algues qui pénétra dans son nez.
C'était une odeur métallique.
Étrange, vraiment étrange, pensa-t-elle. Peut-être un volatile blessé, coincé sous un bloc où la mer l'aurait abandonné. Elle descendit du rocher, puis le contourna. L'odeur se fit plus forte. Léna trébucha, faillit tomber, et ne retrouva son équilibre qu'au dernier moment. Elle se pencha, et jeta un coup d’œil.
Oh mon Dieu, pensa-t-elle.
Ce n'était pas un oiseau blessé. C'était un cadavre. Une femme. Le sang coulait lentement d'une plaie sur sa tête, et de longues zébrures ornaient ses bras. La délicate peau blanche de son cou était également meurtrie par des entailles qui formaient un complexe motif.
Léna resta un moment sans bouger, hébétée, à contempler le macchabée, les yeux dans les yeux avec la mort. Puis, elle reprit ses esprits. Après tout, ce n'était que du sang. Elle examina la jeune femme. Environ vingt-cinq ans, peau laiteuse parsemée de grains de beauté, cheveux blonds bouclés qui retombaient délicatement sur ses épaules dénudées. Sans ses yeux fixes, on aurait pu croire qu'elle était vivante. Réprimant un frisson de dégoût, Léna effleura son bras. Il était encore tiède. Léna abaissa son regard vers les pieds de la jeune femme. Ils étaient tout écorchés. La personne qui l'avait tuée l'avait tirée par les bras, ses pieds avaient rappé contre le granit. Puis cette même personne l'avait abandonnée, ici il y a moins d'une demi-heure. Ce devait être quelqu'un de très précis et méthodique, car les motifs sur son cou étaient soigneusement tracés.
Meurtre. Assassinat. Homicide. Tant de mots pour qualifier ce crime qui venait d'être commis. Mots qui résonnaient dans la tête de Léna. Meurtre. Assassinat. HOMIDICIDE !
Elle prit soudain conscience de la réalité. C'était un acte prémédité ? Quelqu'un avait tué cette femme de sang-froid. Une larme solitaire perla sur la joue de Léna, et une question lui vint à l'esprit.
Qui ?
Occupée à dégainer son portable coincé dans sa poche pour appeler la police, elle ne remarqua pas la plume posée sur la main de la victime.
Plume que le vent breton emporta rapidement.
*
Son rire résonna désagréablement dans ses oreilles.
Soudain elle l'énervait. Pourquoi l'avait-il invitée ? Certes, elle était jolie, mais..
Il soupira de mécontentement. Assise face à lui, elle continuait de parler avec le débit d'une mitraillette, s'arrêtant juste pour reprendre son souffle et rire. Pourtant, il n'y avait rien de drôle dans ce qu'elle racontait.
A présent, il planait complètement, et n'écoutait plus les propos de sa compagne, qui blablatait toujours. Fausse blonde, yeux cernés par un épais trait de crayon noir, top décolleté imprimé léopard et talons vertigineux, elle possédait un genre assez particulier. Malgré tout elle rayonnait, joyeuse et naïve. Ce qui le gênait, c'est qu'elle possédait une intelligence égale à celle d'un poisson rouge. Il lui avait demandé si elle aimait Van Gogh, et elle lui avait répondu qu'elle ne connaissait pas ce joueur de foot. Bref, cette fille était un véritable cliché, un stéréotype ambulant. Cette comparaison le fit sourire, et la femme lui demanda alors :
- A quoi penses-tu ?
Il détestait qu'on lui pose cette question. Non, décidément, il ne comprenait pas pourquoi il l'avait invitée. Il cherchait une excuse bidon pour s'en aller, quand il eut une idée.
Allons faire un tour dehors, j'étouffe ici !
La femme acquiesça, lui lança un sourire (aveuglant) de toutes ses dents blanches, puis le suivit à l'extérieur du bar. Perchée sur ses escarpins, elle ne marchait pas, elle ondulait.
Elle n'ondulerait plus très longtemps, se dit-il.
De sa main gauche, il caressait une plume logée dans sa polaire, tandis que son index droit frôlait le fil tranchant d'un couteau.
Brusquement, il s'arrêta au milieu de la rue. Son évaporée compagne, pendue à son bras comme une veste à un porte-manteau, glissa, et se raccrocha à lui.
Non, il ne la tuerait pas. Elle était trop stupide. Seul les femmes intelligentes représentaient une menace pour lui. Il eut du mal à refréner l'Envie, ce désir pur et fou qui courrait depuis peu dans ses veines. C'était si simple d'ôter la vie. De tout contrôler. D'être enfin le maître, d'être tout puissant. Invincible. Il aimait être le chef, mettre fin à la complexe et ordonnée mécanique du corps humain. Mais non, pas maintenant. Il fallait attendre, guetter, prévoir. Qu'il avait hâte de goûter au plaisir de traquer sa proie, de voir la peur s'allumer dans ses yeux à la vue de son arme, l'étonnement de la victime quand il posait une plume sur sa main, puis la souffrance quand il gravait des mots en russe sur sa peau. «Птица вылетает», «l'oiseau a prit son envol ».
Il s'arracha violemment à l'étreinte de la blonde, qui s'étala de tout son long sur les pavés humides de Lannion. Puis, il disparut à grandes enjambés.
Le patron du bar sortit alors, et lança à la jeune femme :
Eh ! Vous ! Oui, vous ! Je vous vois venir...N'oubliez pas de payer l'addition !
*
Paresseusement étendue sur le canapé, Léna lisait. Le silence était régulièrement brisé par le ronronnement d'un gros matou roux, roulé en boule sur les jambes de la jeune femme. Elle avait passé la journée seule, au calme, pour se remettre de ses émotions de la veille. Un sourire flotta sur ses lèvres. Trouver un cadavre sur une plage, ce n'est pas un loisir courant. Elle attrapa l'objet le plus proche (un crayon gris à la mine pointue : elle aimait que ses crayons gris soient bien taillés) pour marquer sa page, puis elle alluma la télévision. Tandis que le générique du journal de 20h défilait sur l'écran, elle grattouilla le chat sur la tête.
« - Tu n'as pas de soucis toi au moins...Tu ne te rends pas compte de ta chance : tu es nourri, logé, et câliné. C'est beau d'être un chat !
Elle reporta son attention sur la télé. « Femme retrouvée... » Elle changea de chaîne. « Drame à Tresmeur ». Elle zappa de nouveau. « Étranges motifs... »
Évidemment, il fallait s'y attendre, la presse avait été avertie. Le meurtre d'Anna Juvo, (car la victime avait été identifiée) faisait la une de tous les journaux, et était présent sur toutes les chaînes télévisées. Léna éteignit la télé. Au même moment, la sonnerie du téléphone retentit. Son cœur s'accéléra brutalement. Nathaniel ! Elle bondit du canapé, délogeant le chat qui émit un miaulement de protestation.
Allô ? Oui, et toi ?... Rien de spécial, j'ai lu. Pas ce soir ?... Pourquoi ?...Trop de travail, oui je comprends. A demain alors ? OK, je...
Léna hésita un instant, puis se ravisa. Pas maintenant, c'est trop tôt. Ces deux mots étaient trop important pour être utilisé à présent.
Non, rien. Bonne nuit...
Elle pressa le bouton rouge, puis contempla tristement le téléphone. Elle aurait aimé le voir. Tant pis, elle allait regarder un film, en mangeant du chocolat. Drôle de substitut à son petit ami. Est-ce qu'elle pouvait l'appeler comme ça ? Est-ce qu'il méritait qu'elle l'appelle ainsi ? Peut être devrait elle dire « mon copain » ou alors, « mon ami » ?
Et si ce n'était pas du travail qui le retenait chez lui, mais une fille ? Une fille qui n'a pas peur de lui parler du passé, une fille qui évoque des souvenirs joyeux, une fille qui dit oui, pas une fille qui s'échappe quand il veut en savoir plus, quand il veut aller plus loin, roseau qui plie sous le vent.
Le chat se planta devant elle et lui adressa un regard accusateur. S'il avait pu parler, il lui aurait sûrement dit :
Arrête de t'en faire pour rien. Vis au jour le jour ! Vas de l'avant, et surtout, ose !
Elle allait suivre son conseil.
Léna revêtit son manteau, attrapa les clés de sa voiture, et sortit précipitamment. Le vent glacé s'engouffra dans le salon, et fit fuir son félin conseiller.
*
La dernière fois, tout s'était déroulé comme dans un rêve. Un grand calme avait envahit sa tête, faisant enfin taire les souvenirs. Cette fois-ci, rien ne marchait comme prévu. Tout lui échappait. Il n'avait pas réussi à l'assommer du premier coup, si bien qu'elle lui avait lancé un coup de pied mal placé. Il était resté quelques secondes à se tordre de douleur à terre, avant de se relever et de la courser. Elle ne courrait pas bien vite, et de toute façon c'était une impasse. Il l'avait rapidement rattrapée, puis embarquée dans sa voiture pour l'amener jusqu'à la plage. Il avait, après mûre réflexion, décidé de la laisser là.
Un gémissement interrompit le cours de ses pensées. Il regarda la femme qui s'était réveillée.
-Que me voulez-vous ? S'il vous plaît, laissez-moi, laissez-moi ! Pitié... Laissez-moi partir où j'appelle les flics, dit-elle.
-Vous ne pouvez pas, vous êtes attachée, lui répondit-il calmement.
Elle essaya de bouger ses poignets. Malheureusement pour elle, ils étaient liés par une corde qui entaillait sa peau. Paniquée, elle se mit à crier.
Le cri résonna dans ses oreilles.
-Fermez-la !
La femme se tut, et commença à sangloter. Elle était dans un bel état, les cheveux en bataille, une bosse sur le crâne, un talon cassé et les poignets en sang à cause de la corde.
Il soupira.
-Pourquoi je suis attachée ? Vous comptez me faire quoi ? Abuser de moi ou me tuer ?
-Vous êtes attachée parce j'ai besoin que vous le soyez. Je ne compte aucunement abuser de vous. C'est de votre faute.
-Qu'est ce qui est de ma faute ? Vous croyez que je suis contente d'être là ? Alors vous allez me tuer ?
Il ne répondit pas, et s'agenouilla à ses côtés. Il sortit de sa poche un objet qu'elle ne réussit pas à identifier, jusqu'à ce qu'il l'élève au-dessus de sa tête. La lune l'éclaira furtivement, faisant reluire l'acier. Un couteau.
Il lui prit fermement le bras, et entailla la chair tendre.
-Répondez-moi ! Qu'est ce que vous faites ? Salaud, lâchez-moi, vous me faites mal !
Elle grimaça sous la douleur, puis se mit à l'insulter, abandonnant toute politesse, soudain pleinement consciente qu'elle ne verrait plus le jour. Il l'ignora. A l'instant, ce n'était plus une femme, mais un animal apeuré, sauvage, dont l'instinct se réveillait, l'avertissant du danger. Elle essaya de le frapper, mais il évita sans peine le coup, rendu lent par la peur et les poings liés.
-Lâchez-moi, lâchez mo...
Sa phrase fut étouffée par la main que l'homme posa sur sa bouche. Il continuait, inexorablement, de zébrer ses bras d'entailles sanglantes.
*
La jeune femme se gara en soulevant un nuage de poussière. Nathaniel n'était pas chez lui. Il lui avait menti.
Léna actionna la poignée. La porte s'ouvrit en produisant un léger grincement. Ce n'était même pas fermé. Elle pénétra dans la maison.
-Il y a quelqu'un ?
Personne ne répondit. Elle scruta la pièce. De grandes étagères débordaient de livres, remplis à raz-bord. Elle tâtonna à la recherche de l'interrupteur, sans succès. Les volets clos laissaient juste un filet de lumière éclairer la pièce. La jeune femme attrapa un livre et en lut le titre. « L’assommoir », d’Émile Zola. Wouah. Elle reposa le livre à sa place, ouvrit une porte et entra. Cuisine, parfaitement rangée. Elle aurait pu manger par terre tellement c'était propre. Elle fit demi-tour, et se dirigea vers une autre pièce. Son entrée fut salué par des battements d'ailes et des piaillements. Sur deux murs s'étendaient des petites cages, remplies d'oiseaux. Des perruches ondulées, des canaris, des diamants de gould, il y en avait de toutes sortes.
Elle longea un couloir, entra dans une pièce. C'était sa chambre. Le lit était défait, une chemise, un pantalon et une veste traînaient sur une chaise. L'armoire était grand ouverte, des vêtements tombaient de leurs cintres, comme si il avait cherché quelque chose puis était parti précipitamment.
Léna s'avança vers le bureau. L'ordinateur était allumé ! Non, elle ne pouvait pas faire ça. Elle allait sagement aller l'attendre dans le salon.
Mais la tentation était trop forte. Après tout, il lui avait menti. Léna s'assit sur la chaise, et fouilla dans l'historique. Qui sait ce qu'elle y trouverait ? Ses doigts volaient sur les touches, quand elle entendit des cris d'oiseaux, puis le bruit de freins sur les gravillons.
*
Nathaniel se gara devant la maison avec l'adresse de l'habitué qui effectue cette manœuvre plusieurs fois pas jour. Il n'aperçut pas immédiatement la voiture. Il était serein, presque joyeux. Il se mis à fredonner une chanson dont les paroles le marquait.
-How long must we sing this song? How long? How long?
Il s'interrompit en remarquant la minuscule Twingo grise garée devant la vieille maison.
Léna ?
Son cerveau s'activa, il lui fallait trouver une excuse. Il était passé maître dans l'art de mentir, elle ne se douterait de rien. Il rebroussa chemin, fouilla sous le siège passager de son véhicule (sa poubelle, il jettait tout là-dessous), et attrapa ce qui lui tombait sous la main. Ses doigts effleurèrent quelque chose de gluant, (qu'est-ce que ça pouvait bien être ?) puis un plastique collant, avant de s'emparer d'un objet doux et flétri. Il sortir sa main de l'ombre pour découvrir...Une endive. Une endive ? Une endive en mai ? Depuis combien de temps traînait-elle là ? Il était temps de ranger. Vraiment.
Il marcha vers la vieille bâtisse. Il poussa la porte au bois élimé, puis entra.
Léna attendait, assise entre deux ressorts sur un canapé miteux, les bras croisés.
-Qu'est ce que tu fais là ?
-Quand on est poli, on dit d'abord bonjour.
Aïe, elle était vraiment en boule.
-Bonjour.
Il posa furtivement ses lèvres sur les siennes, puis se recula.
-…
-Je suis allé acheter une endive au supermarché...J'avais envie d'une salade.
Il tressaillit devant le regard foudroyant que la jeune femme lui adressa.
-Tu te fous de moi ?
Merde. Merde ! Se rattraper, trouver une idée, et vite.
-J'ai pris celle qui venait... J'étais pressé de rentrer pour travailler.
-La saison des endives c'est en mars. Pas en mai.
-Il a fait tellement froid que ce n'est pas un souci.
Le regard de Léna se radoucit. Ouf, sauvé...Pour cette fois.
-Comment es-tu rentrée ?
-J'ai pété une fenêtre, fait-elle, un sourire moqueur plaqué sur les lèvres. Mais non, je suis passée par la porte, comme tout le monde ! Tu devais en avoir sérieusement envie de ta salade, pour oublier de fermer en partant !
-Ah...
Naturellement, elle se dirigea vers la cuisine, fouilla dans plusieurs placards, dénicha un saladier, deux tomates, des noix. Devinant sa pensée, il sortit une planche à découper, des couteaux, de quoi mettre la table.
-J'ai fait la connaissance de ta ménagerie...C'est joli toutes ces couleurs.
-J'aime les oiseaux. Alors quoi de plus naturel que d'en élever ?
-Faut que tu me les présente en bonne et du forme. Ils ont des prénoms ?
-Plutôt des numéros, à part mes favoris bien sûr.
-Parce qu'il y a des chouchous en plus ?
A présent ils mangeaient la salade mensongère, assis sur les chaises froides, devant la table en bois abîmé, rayée par le passage de multiples objet, porteuse de longues balafres gravées dans le chêne (cicatrices de guerre ?).
Nathaniel scruta le visage de Léna. Son cœur se serra. C'est la première fois qu'il ressentait cela pour une femme. Léna était un paradoxe vivant. Son paradoxe.
Des cheveux couleur aile de corbeaux, légèrement ondulés, épais et sombres, encadrant un petit visage ovale taillé à la hache, aux angles cassants qui lui donnaient un air sauvage. De grands yeux à la couleur indescriptible, gris, verts, avec des nuances fauves près de la pupille et des paillettes d'or, qui mangeaient son petit visage. Ses yeux clignaient souvent, observaient tout et vous transperçaient, paraissaient lire en vous, semblaient distinguer chaque parcelle de votre âme. Des yeux dans lesquels on évite de plonger son regard, que l'on affronte pas. Un nez de taille moyenne, et une bouche charnue qui paraissait minuscule, tant ces yeux étaient grands. Des mains qui papillonnaient à chaque parole, aux longs doigts, un poignet minuscule aux os fins. Un grain de beauté sur la joue, un au-dessus du sourcil droit, et un autre qui le narguait dans la nuque. Un rire de petite fille piégé dans ce corps de femme. Corps mince et souple parfois, dur et cassant là où les coudes saillent, où les clavicules accentuent la minceur, où les os des hanches sont trop visibles. Presque trop mince, si bien qu'il aurait peur de la casser. Avec ça un caractère changeant, assorti au physique. Elle pouvait faire preuve d'une colère incontrôlable et l'instant d'après, fondre en larme en se rendant compte des dégâts causés par cette rage sourde. Elle pouvait être tendre et douce, tenter puis repousser, se dévoiler puis ne plus parler du passé pendant plusieurs jours. Elle écrivait, puis elle effaçait. Arrête Léna, arrête d'effacer...
-Pourquoi tu me regardes comme ça ?
-Tu es belle.
Elle s'attendait à tout sauf à cette réponse. Un étonnement total se lisait sur son visage. Elle avait un charme particulier, avec cet air à la fois fragile et dur, mais il était attiré par elle comme un aimant l'est par le métal. Il avait envie d'être toujours à ses côtés, de la voir, de la toucher. Il...l'aimait ?
Sentiment nouveau pour lui. Il n'avait jamais connu ça.
Nathaniel se pencha vers la jeune femme, toute réserve disparue, et posa sa bouche sur la sienne.
-Léna...Je t'aime.
*
De multiples pensées déferlèrent dans l'esprit de Léna. C'était un innommable bordel dans son crâne. Il lui semblait que ses neurones dansaient la salsa. Mais quand Nathaniel l'embrassait, tout se taisait, c'était un calme plat qui chassait le stress et les pensées. Des frissons électriques parcoururent son corps, bientôt suivis d'une vague de chaleur apaisante.
Un peu plus et elle aurait pu se croire dans un film de Walt Disney dégoulinant de mièvrerie et de tendresse, où tout est bien qui finit bien, où le grand méchant est puni et l'adorable princesse heureuse. Beurk. On oublie de dire aux petites filles que le cheval blanc se casse régulièrement la jambe et coûte super cher à remplacer, que le prince est un coureur de jupon qui largue Blanche-Neige pour sa marâtre, et surtout que le prince n'est pas toujours celui que l'on croit. Rien n'est tout beau, tout blanc tout gentil, rien n'est tout noir, tout méchant, tout horrible. Le monde est juste fait de milliers de nuances de gris.
Et personne n'est parfait. On ne le sait pas, mais la princesse est peut être amoureuse de l'un des sept nains. Peut-être aussi qu'elle a des boutons, un nez trop grand, des yeux trop petits et des sourcils trop épais. La perfection n'existe pas, quoi que Blanche-Neige dise.
Nathaniel était ponctuel, galant juste ce qu'il faut, gentil, intelligent sans aucun doute, ni pauvre ni riche, cultivé (il lit Zola!), pas cochon (aucun site bizarre dans son historique)
Ce n'était pas possible, il devait bien avoir un défaut !
Il était trop parfait pour être réel... Juste pour être sûre, elle le pinça. On ne sait jamais.
-Aïe ! Qu'est ce que tu fais ?
-Je voulais juste vérifier que tu existais vraiment...C'est trop beau pour être vrai !
-J'embrasse si bien que ça ?
Ils rirent à l'unisson, mais le rire de la jeune femme se brisa à l'instant où Nathaniel lui ôta son pull et caressa son dos. Le prince avait-il des intentions...moins innocentes ? Il était temps de l'arrêter là.
A moins que...
Non, non, tais-toi Léna. Ne dis rien, c'est trop agréable. Chut, chut, chut. Alors la petite voix de la raison se tut, et les mains continuèrent leur œuvre. Elle atteignirent bientôt une zone pâle et bosselée, quittant le satin de la peau dorée. Une cicatrice ?
-Qu'est ce que...fit-il.
-Rien. Ce n'est rien.
Il ne posa pas de questions, de peur de briser l'instant présent.
*
Le soleil du matin entra par la fenêtre et réveilla Léna. Elle ouvrit difficilement les yeux, et sourit en apercevant Nathaniel endormi à ses côtés. Le prince charmant était encore dans les bras de Morphée...
Elle repoussa la couette, pose ses pieds à terre. Ses poils se hérissèrent sous la caresse du froid, un frisson glacial courut le long de sa peau nue. Elle se leva, et enfila des chaussons beaucoup trop grands pour elle. Taille 43 alors qu'elle chaussait du 38. Comique, elle allait marcher comme un canard. Elle revêtit ses vêtements de la veille, et farfouilla à la recherche de ses clés. Envie de pain frais tartiné de Nutella. Bonheur des papilles en perspective. Elle sortit sans faire de bruit, referma la porte derrière elle, sourire jusqu'au oreilles. Elle était heureuse, enfin.
Elle attrapa une polaire marron très laide, pour se protéger du froid. Pas très esthétique, mais au moins elle aura chaud. Le soleil a beau briller de toutes ses forces, il y a toujours un vilain petit vent qui souffle le matin.
Elle entra dans la boulangerie, et renifla la bonne odeur de pain frais. Miam. La jeune femme ressortit, deux baguettes croustillantes et farineuses sous le bras. Elle fourra la monnaie dans sa poche, se dirigea vers la maison de la presse. Elle aimait bien lire les nouvelles du jour. Assise dans la voiture, elle déplia le journal qu'elle venait d'acheter, avant de laisser échapper un juron en découvrant la une.
« L'oiseau tueur a encore frappé »
Ainsi ce n'était pas un crime passionnel isolé. Un malade mental courrait en liberté sur les plages trébeurdinaises et provoquait la police en abandonnant sa pauvre victime non pas sur la plage de Tresmeur cette fois-ci, mais à Goas Trez. Ça donne envie d'aller pêcher des palourdes tout ça, pense-t-elle.
En effet, à Trébeurden, il y a quatre plages. Tresmeur, où les habitués et les touristes se retrouvent, Goas Trez pour la pêche aux coques ou la pêche aux palourdes, Pors Termen quand le vent du nord souffle, ainsi que Pors Mabo, pour les gens solitaires.
Un meurtre pour chaque plage ? C'est le même tueur, c'est encore une femme avec un mot gravé dans la chair. « Птица была там », « l'oiseau est passé par là ». Énigmatique. Une plume avait également été retrouvée, coincée dans les cheveux de cette pauvre femme. Les journalistes prétendaient que c'était un crime parfait. Pas d'ADN, pas de témoins. Aucuns indices. Ils savaient juste que c'était un homme.
Cela la dégouttait qu'un tel monstre soit en liberté. Peut-être l'avait-elle même déjà rencontré, sans savoir qui il était. Elle souhaitait vraiment qu'il se retrouve sous les barreaux.
Comment fait-il pour faire taire sa conscience, et ignorer les remords, se dit elle ?
Si remords il y avait.
*
Léna enleva la polaire et la jeta négligemment sur le canapé. Elle remplit la gamelle du chat, avant de foncer dans sa chambre. Elle sortit une valise d'un placard, attrapa quelques vêtements dans son armoire, saisit des livres, et balança le tout à l'intérieur. Trop pressée pour bien plier. Trop hâte de revoir Nathaniel...
Nathaniel... Brun, des yeux en amande couleur ambre, qui la contemplait tendrement. Nathaniel, aux bras réconfortants qui lui donnaient l'impression d'être en sécurité. Nathaniel, qui avait éveillé en elle des sensations inconnues, avec qui elle avait redécouvert son corps.
Ses pensées furent interrompues par le gargouillement de son estomac. Deuxième constatation anti-Disney : on ne peut pas vivre d'amour et d'eau fraîche. Baloo est en fait un gros menteur.
Elle ferma la valise, et se précipita dans le salon. Elle chercha ses clés du regard. D'habitude elle les posaient...N'importe où en fait.
Elle chercha un peu partout, avant de s'emparer de la polaire de Nathaniel et d'en fouiller les grandes poches. Elle la portait en sortant de la voiture, elle avait peut-être fourré les clés dedans...
Impatiente, elle secoua la polaire. Des pièces tombèrent en tintant (la monnaie du pain!), bientôt suivies par un emballage de chewing-gum et une plume. Une plume ? Elle fouilla l'autre poche, secoua le vêtement dans l'autre sens. Ses clés tombèrent, ainsi qu'un couteau.
Un couteau ? Une plume ?
Non, non.
L'oiseau tueur...
Pitié, non. Non, pas lui. C'était une erreur. Un cauchemar peut-être.
Tu aimes un tueur...
Léna ouvrit les yeux, mais le couteau et la plume gisaient toujours à terre. Elle les attrapa pour les examiner de plus près. La plume était d'un jaune délicat. Une plume de canari. Le couteau, lui, était parfaitement propre.
Après tout, il pouvait bien garder un couteau dans sa poche pour se défendre. Et la plume était peut-être un souvenir. Une émouvante relique.
Un point d'un rouge presque noir attira son œil sur l'objet. Dans le petit creux entre la lame et le manche, une goutte de sang coagulé.
Plus de doutes cette fois, plus d'excuses.
Léna s'effondra au sol, et se mit à sangloter. N'aurait-elle donc jamais droit au bonheur ? Pourquoi fallait-il toujours qu'elle tombe sur la mauvaise personne ? Pourquoi ? Pourquoi ?!
Des larmes roulèrent sur ses joues, perles de tristesses, avant de s'écraser au sol, mouillant la petite plume. La jeune femme l'attrapa et la lança vers le mur. Elle retomba tristement à terre sans même le toucher. Elle lança alors le couteau rageusement. Il griffa la tapisserie et tomba avec un tintement métallique. Elle suffoquait, étouffait dans ses larmes, anéantie. Alors il ne l'aimait pas vraiment ? Elle était juste une future victime, trophée de chasse parmi tant d'autres. Vu son minois et son charme dont il usait et abusait, toutes les femmes devait être à ses pieds.
Ses larmes redoublèrent, et elle se roula en position fœtale sur le lino froid. Dégoût, amour, tristesse et regrets se mélangeaient. Elle se traîna ensuite jusqu'aux toilettes, où elle rendit tout son petit-déjeuner. Elle n'était plus que le pâle reflet de la Léna heureuse de ce matin. Ses cheveux emmêlés semblaient à présent gris dans la lumière blafarde des néons, et elle était livide. Elle s'assit sur la cuvette dont elle avait fermé l'abattant, puis pris sa tête entre ses mains. Elle recommença à pleurer. Qu'allait elle faire à présent ?
Un miaulement brisa le silence, bientôt suivi par un doux ronronnement. Le chat.
Elle le serra dans ses bras, un peu trop fort à son goût, car il se dégagea et s'enfuit en courant.
Même le chat ne l'aimait plus.
C'était la fin des haricots.
*
Pas de chance pour lui, elle habitait au deuxième étage d'un petit immeuble. Coup de chance, elle était chez elle.
Nathaniel hésitait. L'ascension serait difficile, peut-être douloureuse, mais pas impossible. Il cala ses pieds dans les interstices du mur et se hissa, étreignant la gouttière. Celle-ci gémit sous son poids et ploya dangereusement. Il ne se laissa pas décourager, monta plus haut, toujours plus haut. Enfin, il s'accrocha au balcon, et roula sous la barrière en verre.
Un mois qu'elle n'avait pas donné de signes de vie. Un mois qu'il avait passé seul, entre ses oiseaux, ses livres, ses doutes et ses démons. Et, accessoirement, ses collègues de travail.
Il distinguait vaguement sa silhouette derrière le rideau blanc, mais cela lui suffisait. Il voulait juste s'assurer qu'elle était vivante. Un accident de voiture, c'est si vite arrivé !
Rasséréné, il entreprit de descendre par le même chemin. La descente est toujours plus dure que la montée, se rappela-t-il. La gouttière grinça une nouvelle fois, et se décrocha. Des branches craquèrent, il se prit des fleurs dans la figure, puis, enfin, ses pieds touchèrent le sol. Juste à temps. Dans un réflexe surhumain, il attrapa la gouttière et amortit sa chute.
Il se dégagea du massif d'hortensia dans lequel il avait atterrit, frissonnant sous la morsure du vent. Il ne trouvait plus sa polaire.
Des branches craquèrent et il retint son souffle. Le silence régnait. Il se mit à courir, jetant de temps à autre un coup d’œil derrière lui. Tout à sa peur d'être découvert, il ne vit pas la masse sombre qui se dressait devant lui.
Il heurta la poubelle de plein fouet. Elle s'écroula sous l'impact, expulsant le sac poubelle. Un objet pointu le transperça, les ordures se dévidèrent sur le bitume.
Quelle ne fut pas la surprise de Nathaniel de découvrir son couteau émergeant de la gueule béante du monstre de plastique.
Les pièces du puzzle s'assemblèrent...
Engoncée dans son manteau, une écharpe nouée autour du coup, les cheveux soulevés par le vent, elle marchait. La promenade était déserte, on aurait dit une ville, ou plutôt, une plage fantôme. Les couleurs lui semblaient tristes et délavés, le sable s'envolait en lui fouettant le visage. Cet environnement d'habitude si familier était aujourd'hui presque agressif.
Le mauvais pressentiment qui l'avait atteinte quelques mois plus tôt enserra à nouveau sa poitrine d'une main de fer. A présent elle étouffait sous le ciel bas, il lui semblait entendre des pas derrière elle, elle sentait la piqûre brûlante d'un regard sur sa nuque. Son cœur se serra un peu plus.
« Tu deviens complètement parano. Complètement folle. Continue de marcher, tu rêves, tu rêves, tu rêves, tu rêves, ce n'est rien, ce n'est rien. »
Mais la sensation persistait, augmentait, et, n'y tenant plus, elle se retourna.
Elle ne rêvait pas. Il était bien là, derrière elle, un sourire avenant plaqué sur ses lèvres. Ce sourire... Il n'atteignait pas ses yeux, qui restaient froids, durs, emplis d'une lueur qu'elle n'avait encore jamais vue.
« - Léna...
Que faire ? L'ignorer ? Fuir ? Il courrait plus vite qu'elle, il aurait vite fait de la rattraper. Lui parler ?
-Tu sais que tu m'as manqué...Ce n'est pas très poli de laisser des gens qu'on aime sans nouvelles...Sans rien...pendant un mois. Tu te rends compte ? C'est long un mois, ça laisse le temps de réfléchir...de planifier....
Elle paniqua.
-Laisse-moi ! Disparais ! Disparais de ma vie ! Je ne veux plus te voir. Après ce que tu as fait...Je ne pourrais même plus te regarder dans les yeux, lui cracha-t-elle.
- Tu en es sûre ?...
Avec un mouvement félin, qu'elle ne put arrêter, il attrapa son menton, forçant ses yeux à se plonger dans les siens, enserrant cruellement son poignet dans son autre main.
Ce regard la glaça littéralement. L'éclat chaud de ses prunelles noisettes n'existait plus. Rien que ce regard glacial, qui l'étouffait, la broyait.
-Léna...répéta-t-il d'une voix mielleuse, ma chère, ma tendre petite Léna...Si faible, si fragile...
Elle sentit quelque chose de froid contre son cou, un éclat bleuté l'aveugla.
-Tu cries, j'appuie. J'appuie, tu meurs, susurra-t-il d'une voix suave, juste à côté de son oreille.
Un couteau.
Elle ravala le hurlement qui montait dans sa gorge. Il la poussa légèrement, la main fermement ancrée sur l'arme.
-Avance.
Et elle avança, tandis que son esprit tournait à cent à l'heure. Elle le pensait tout à fait capable de la tuer. Même si elle criait, personne ne l'entendrait. Ses pas s'enchaînaient, tandis qu'elle priait pour que quelqu'un, de préférence fort, arrive et remarque leurs comportements anormaux. Elle ne pouvait pas se soustraire à son étreinte, il était plus grand, et sans aucun doute plus fort qu'elle. Aucun échappatoire possible.
Ils descendirent un escalier, marchèrent un moment sur le sable humide, puis il l'entraîna sur les rochers. Elle peinait à avancer, collée à lui. Il arrivèrent bientôt dans une petite crique, à l'abri des éventuels regards.
-Qu'est-ce que tu vas faire de moi maintenant ? Tu vas me tuer ? Comme les autres ? Dit-elle. Le crime parfait n'existe pas. Alors arrête. On peut se tromper une fois, deux fois, trois fois. Mais il faut savoir reconnaître ses erreurs. C'est ça l'intelligence, la vraie. Stoppe tant que tu peux encore !
Elle avait tenté de faire passer à travers sa voix toute la force et la détermination qui l'habitaient encore. Peine perdue.
-Je n'ai rien à perdre. Absolument rien. Alors personne ne m'arrêtera
-Tu arrives à dormir la nuit ? Tu arrives à les faire taire les remords ? A étouffer ta conscience ? Ou est-ce que tu es juste un monstre sans cœur ? Et puis pourquoi ? Pourquoi tuer des femmes innocentes ?
-Je suis un monstre. Le meurtre, c'est une drogue, une drogue pure et dure, dont je ne serais plus jamais sevré.
-Je pensais que tu....
Les mots restèrent bloqués.
-Tu pensais que je t'aimais ?
Il approcha son visage du sien, si près qu'elle eut un instant la fugace espérance qu'il allait l'embrasser, que tout cela n'était qu'un cauchemar, un mauvais rêve. Qu'elle se réveillerait dans une vie parfaite. Il la plaqua contre le sable, le couteau toujours contre sa peau.
-Et bien tu t'es trompée.
Choquée, elle oublia un instant sa position de victime pour lui lancer une gifle. Elle profita de la seconde d'inattention qui suivit pour le repousser et s'éloigner tant bien que mal, des larmes roulant sur ses joues. Nathaniel jura entre ses dents, avant de la rejoindre. Il l'attrapa et bloqua ses poignets à l'aide de son bras libre, la joue marbrée de rouge.
-Tu pensais vraiment que je t'aimais ? Je suis un monstre Léna. Un monstre. Je suis incapable d'éprouver des sentiments pour quiconque ! Je vais te tuer !
-Je m'en fous. Parce que moi, je t'aime, dit-elle
-Tiens, c'est maintenant que tu t'en rends compte, je croyais que je te dégoûtais ? C'est contradictoire comme sentiments...Et là, tu m'aimes encore ? Tu ne me détestes toujours pas ? Siffla-t-il en traçant une sanglante balafre sur son bras, presque délicatement, de la pointe de son arme, comme un peintre appliqué sur sa toile.
Il y a peut-être des fautes de frappe ou d'orthographe, ce n'est que le "premier jet" on va dire, je n'ai pas encore relu, corrigé et amélioré
EDIT : j'ai rajouté la suite de la suite x) je suis en pleine période d'inspiration, alors ça va vite !